Et si on réformait l'orthographe?

Publié le par Laura

          Dans Le Monde 2 n°251 du samedi 6 décembre 2008, on peut lire à partir de la page 34 un entretien entre Pascale Krémer, journaliste au Monde et André Chervel, spécialiste de la langue française, agrégé de grammaire, docteur ès Lettres et chercheur au Service d'histoire de l'éducation de l'Institut national de recherche pédagogique(!).
          Celui-ci fait état de la baisse considérable du niveau des élèves français en orthographe, et ce depuis maintenant plusieurs décennies. Alors que lui-même a longtemps cru que ce discours du "tout-fout-le-camp" était infondé, une enquête du MEN de 1996 prenant pour point de comparaison les élèves des années 20 lui ouvre les yeux et démontre la véracité de tels propos.
          Dès lors, André Chervel analyse-t-il l'historique de la langue pour trouver une explication à cet arrêt de la progression qui s'était lancée à partir de la loi Guizot de 1833 (les maîtres étaient alors obligés d'enseigner l'orthographe aux élèves et  devaient donc la connaître eux-mêmes!). A partir de son étude, il constate que très régulièrement, "au cours des siècles [...]l'orthographe française s'est [...] réformée". Par exemple, vers 1667, les consonnes muettes sont éliminées: poictrine = poitrine, escrire = écrire,... Cela a permis de simplifier l'orthographe et de faciliter son apprentissage. Mais depuis 1835, la langue française reste bloquée et stagne sans aucune évolution ni simplification possible. André Chervel s'étonne d'ailleurs que notre orthographe actuelle soit celle de "la sixième édition du dictionnaire de l'Académie française, celle de 1835"!
          Pour le spécialiste, la raison de la baisse des élèves en orthographe est essentiellement due à sa complexité. Le français est d'ailleurs une des langues les plus difficiles d'Europe. Il est vrai qu'on s'y perd rapidement entre les doubles consonnes, les lettres muettes et les incongruités... La solution résiderait donc dans une réforme de l'orthographe. Car selon André Chervel, celle-ci devient de plus en plus une pratique élitiste et "un handicap social pour ceux qui ne la maîtrisent pas". Afin que tout le monde soit sur un même pied d'égalité, il faut donc simplifier l'orthographe française pour la rendre plus logique et donc plus facile à enseigner et à apprendre.
         
          Quelques exemples de propositions de changements:

  • supprimer les consonnes qui ne se prononcent pas (collège = colège, difficile = dificile) par contre il est essentiel de garder les doubles consonnes telles que dans les mots "acceptable" ou encore "aussi".
  • supprimer les lettres grecques et ne plus se fier à l'éthymologie (Hypothèse = ipotèse, bibliothèque = bibliotèque, chronique = cronique,...).
  • homogénéiser le pluriel afin que tous les noms et adjectifs prennent un "s" au pluriel (des animaux = des animaus, ...)

          Alors pour ou contre une simplification de l'orthographe? Personnellement, dans un premier temps je me suis sentie quelque peu destabilisée par ce propos, par cette idée de chambouler notre langue (qui a été si difficile à apprendre): car qu'en est-il de ceux qui en maîtrisent sa complexité  (je ne m'intègre pas spécialement dans ce groupe)? faudrait-il qu'ils réapprennent en "désapprenant"? Cependant, au fur et à mesure de ma lecture, les arguments d'André Chervel m'ont convaincue ou du moins interpellée. Et puis ce serait tellement plus simple avec cette nouvelle orthographe, plus besoin de sortir le dictionnaire à tout bout de champ pour vérifier que tel mot prend bien deux "n"!

Vous pouvez lire cet entretien sur le site en ligne du Monde en cliquant ici.

Publié dans Système éductatif

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